Dans la perspective de mieux qualifier les productions des sujets atteints de la maladie d’Alzheimer (MA), et plus spécifiquement les fabulations, lors des tests d’évaluation de la mémoire, nous proposons une analyse linguistique qualitative de 5 passations de L’Histoire du lion de Barbizet. Sur l’ensemble de ces passations, 4 contiennent des fabulations. Pour la cinquième, il s’agit d’invention assumée. Cette approche comparative vise à préciser encore davantage la spécificité des fabulations.
Notre étude aspire alors à questionner cette notion de fabulation d’un point de vue linguistique, dans une perspective sémantique et interactionnelle. Pour ce faire, nous cherchons à préciser les points d’ancrage de ces phénomènes mais aussi la forme de leur cotexte, notamment par le relevé des disfluences. Nous questionnons également le vécu de la situation d’évaluation par les sujets et les aspects relationnels qui sous-tendent les rapports sujets/évaluateur.
Il ressort que les fabulations sont des phénomènes consistants, confirmés lors du rappel différé. Elles sont balisées par le genre et révèlent à leur façon le parcours interprétatif réalisé par chacun des sujets, soit, par là même, leur capacité à faire trace. En ce sens, elles s’apparentent à un mécanisme compensatoire pérenne. Une évolution plus sensible s’observe sur la forme du cotexte avec une tendance à la baisse des disfluences entre les rappels. L’invention assumée se distingue tant par son fond que par sa forme, révélant un mécanisme différent, moins opérant. Enfin, nous constatons la difficulté incarnée par la situation de test qui reste confrontante pour les sujets.
Nos résultats nous invitent à reconsidérer la finalité de l’évaluation et dans la continuité, l’accompagnement proposé aux sujets MA et à leurs aidants.