29 Jan 2020 Combien de temps devrions-nous passer dans la nature pour notre bien-être ?
C’est un fait : passer du temps dans des environnements naturels est bénéfique pour notre santé physique et psychologique. Mais y a-t-il un seuil minimal à atteindre pour que les effets de la nature sur nous soient réellement positifs ? C’est la question qu’une équipe de chercheurs de l’Université d’Exeter, en Angleterre, s’est posée. Grâce à leur étude à très grande échelle, ils sont parvenus à déterminer la « dose minimale hebdomadaire de nature » que nous devrions nous administrer.
Nombreuses sont les études qui font état d’une amélioration de la santé et du bien-être lorsque nous passons du temps dans des environnements naturels (forêts, parcs urbains, plage, etc.). Même si les preuves varient (en quantité et en qualité) selon les recherches, vivre dans des zones urbaines plus « vertes » est régulièrement associé à des risques plus faibles de maladie cardiovasculaire, d’asthme ou encore de dépression. Certaines études (voir White M. et coll., 2013) indiquent aussi un meilleur développement cognitif chez les enfants qui habitent près d’espaces verts. Le plus souvent, les recherches sur l’impact de ces espaces de verdure sur la santé prennent en considération leur quantité (couverture) ou leur distance par rapport aux habitations. Un autre moyen à la fois alternatif et complémentaire est d’étudier l’exposition des êtres humains à la nature est de mesurer le temps qu’ils passent réellement dans des environnements naturels. C’est cette orientation que l’équipe de recherche menée par Mathew P. White du Centre européen pour l’environnement et la santé humaine (Université d’Exeter) a prise.
19806 personnes ont été sélectionnées à partir de l’enquête réalisée en Angleterre sur l’engagement pour le milieu naturel. Les scientifiques ont examiné les associations entre le contact avec la nature au cours des 7 derniers jours et la santé et le bien-être autodéclarés. Le contact avec la nature récréative, ou le temps passé dans des environnements naturels au cours de la dernière semaine, a été calculé en multipliant le nombre de visites récréatives déclarées par semaine par la durée d’une visite choisie au hasard au cours de la dernière semaine. 7 catégories de durée ont alors été retenues : 0 min (11 668 personnes) ; 1 à 59 minutes (n = 355) ; 60 à 119 minutes (n = 1 113) ; 120 à 179 minutes (n = 1 290) ; 180-239 min (n = 1 014) ; 240-299 min (n = 882) ; ?300 minutes (n = 3 484). Quant à l’état de santé autodéclaré, les réponses possibles étaient : « très mauvais », « mauvais », « passable », « bon » et « très bien ».
Les résultats indiquent que les personnes qui ont passé entre 1 et 119 minutes dans la nature au cours de la dernière semaine n’ont pas déclaré de meilleurs niveaux de santé ou de bien-être que celles qui n’ont pas du tout baigné dans un espace vert. En revanche, à partir de 120 minutes, ces niveaux s’avèrent systématiquement supérieurs à ceux des personnes qui avaient renseigné aucune exposition. Les auteurs suggèrent, par conséquent, que cette durée hebdomadaire de 2 heures de contact avec la nature pourrait représenter un seuil en dessous duquel le temps passé dans des espaces naturels serait insuffisant pour produire des bienfaits significatifs sur notre santé et notre bien-être. De plus, l’étude rapporte que ce « seuil » serait effectif chez les hommes et les femmes, ainsi que chez les adultes plus âgés et plus jeunes, appartenant à différents groupes professionnels et ethniques, parmi ceux vivant dans les zones riches et pauvres, et même parmi les personnes souffrant d’une maladie ou d’un handicap de longue durée. Enfin, que cela soit en une seule visite ou bien en plusieurs immersions plus courtes, la manière dont ces 120 minutes sont atteintes semble importer peu.
Pour conclure, bien que cette recherche présente des limites importantes, notamment sur la façon dont ces 2 heures hebdomadaires sont utilisées (promenade, footing, contemplation assis sur un banc, … ?), elle a le mérite de mettre en lumière l’importance de mesurer directement le contact avec la nature, plutôt que de mesurer seulement la proximité résidentielle comme indicateur indirect d’exposition à la nature. Et ses résultats contribuent, selon les auteurs : « à alimenter les discussions visant à formuler des recommandations simples sur le temps passé dans des environnements naturels pouvant entrainer une promotion significative de la santé et du bien-être. »
Mickaël Lenfant
Docteur en Sciences du Langage, Service éditorial HappyNeuron