Regarder la télévision est-il un loisir préconisé pour les personnes atteintes de démence ?

Margrét Gústafsdóttir, une chercheuse Islandaise, s’est intéressée aux effets de la télévision en tant qu’activité de loisir chez des seniors atteints de démence et résidant en EHPAD. Outre un outil de vecteur social, la télévision présente de multiples avantages.

Omniprésente dans les foyers depuis les années 60, la télévision accompagne les français depuis leur plus jeune âge jusqu’à leur fin de vie même si depuis l’apparition et la montée en puissance du web, cette tendance semble s’inverser [1].
Ce média a joué un rôle crucial dans la diffusion et l’accessibilité à l’information, au divertissement et à la culture. De leur côté les foyers ont modifié leurs habitudes et intégré la télévision à des moments clés de la vie de famille, comme les repas. C’est donc une mutation sociale qui s’est opérée au XXème siècle et qui a aussi impacté le secteur du soin et de l’hébergement des seniors. En effet, la télévision se retrouve aujourd’hui au coeur des lieux de vie, comme le salon et la chambre, des résidences médicalisées et non médicalisées qui accueillent des seniors. C’est un continuum logique puisqu’on estime aujourd’hui que plus de 94% des foyers français [2] sont équipés d’un téléviseur.
Une chercheuse Islandaise, Margrét Gústafsdóttir, s’est intéressée aux effets de la télévision en tant qu’activité de loisir chez des seniors atteints de démence et résidant en EHPAD [3]. Pour cela, elle a fait parvenir à des dizaines de résidences un questionnaire ayant pour objectif d’évaluer les habitudes de consommation de ce média par les résidents avant et après le diagnostic de leur démence. Au total 152 réponses produites par les seniors et la famille ont été retournées à la chercheuse. Il s’avère que plus la démence progresse, moins la télévision devient une part importante de la vie des résidents alors que celle ci jouait un rôle important dans leur vie dans 70% des cas. Toutefois, dans son étude Margrét Gústafsdóttir met en évidence que la présence d’une autre personne assise à côté d’un senior lorsqu’il regarde la télévision augmente considérablement son intérêt quelque soit le stade de la démence.
Malgré les impacts cognitifs liés à l’apparition d’une démence, la télévision semble continuer de jouer son rôle de vecteur social pour les seniors. L’auteure conclut que ce média représente un outil intéressant pour mener une thérapie par réminiscence. Ancrée dans les habitudes de nos seniors, ce média audiovisuel est donc une pierre angulaire sur laquelle les aidants professionnels peuvent s’appuyer pour favoriser les interactions sociales entre seniors et pour solliciter leur mémoire individuelle épisodique et autobiographique.

Par Julien Moly
Master Neurosciences
Spécialiste du secteur médico-social

Références :
[1]https://www.meta-media.fr/2018/06/26/en-2019-la-consommation-internet-depassera-celle-de-la-television.html
[2]https://www.ouest-france.fr/medias/television/pres-de-94-des-foyers-francais-sont-equipes-d-un-televiseur-6082929
[3] Margrét Gústafsdóttir, Is Watching Television a Realistic Leisure Option for People with Dementia?, Dement Geriatr Cogn Dis Extra. 2015 Jan-Apr; 5(1): 116–122.